Parmi les différents (et nombreux) médicaments antihémorroïdaires disponibles sur le marché, certains font office de références des officines. L’on pense bien évidemment à Daflon, à la crème rectale Sédorrhoïde ou à la pommade Titanoréïne, mais aussi à Ginkor Fort. Ce médicament, souvent conseillé par les pharmaciens en cas de jambes lourdes, est aussi plébiscité en situation de crise hémorroïdaire. Mais qu’en est-il de son efficacité réelle ?
Voici un avis Ginkor Fort complet comme traitement des hémorroïdes.
Sommaire
- Avis Ginkor Fort contre les hémorroïdes : en quoi consiste ce traitement ?
- Avis Ginkor Fort contre les hémorroïdes : qu’en dit la Haute Autorité de Santé ?
- Avis Ginkor Fort contre les hémorroïdes : une composition pertinente en cas de maladie hémorroïdaire ?
- Avis Ginkor Fort contre les hémorroïdes : mécanisme d’action et efficacité
- Avis Ginkor Fort contre les hémorroïdes : conclusion
- Les alternatives à Ginkor Fort
- Sources
Avis Ginkor Fort contre les hémorroïdes : en quoi consiste ce traitement ?
Classe pharmacothérapeutique
Ginkor Fort est répertorié par la Base de données publique des médicaments comme un médicament vasculoprotecteur, c’est-à-dire qu’il contribue à renforcer la paroi des vaisseaux sanguins. Il n’est donc pas officiellement un veinotonique. Pour autant, il est préconisé dans le cadre des troubles de la circulation sanguine : insuffisance veineuse et maladie hémorroïdaire.
Utilisation et posologie
De nombreuses précautions d’emploi bornent l’utilisation de Ginkor Fort :
- le médicament ne doit pas être pris en cas d’allergie ou d’hypersensibilité à l’un de ses composants ;
- il ne doit pas être associé à d’autres médicaments, notamment certains antidépresseurs (inhibiteurs de monoamine oxydase ou IMAO), anticoagulants (phenprocoumone, warfarine, étexilate de dabigatran), antiagrégants plaquettaires (clopidogrel, acide salicylique) et AINS ;
- il est déconseillé aux femmes enceintes et allaitantes ;
- il doit être arrêté avant toute intervention chirurgicale – risque hémorragique.
"De nombreuses précautions d’emploi bornent l’utilisation de Ginkor Fort"
Ginkor Fort est surtout connu dans le traitement d’appoint de l’insuffisance veineuse, qui se manifeste par des sensations de jambes lourdes, des œdèmes, des paresthésies et des douleurs. Toutefois, le médicament est aussi préconisé en cas de poussée hémorroïdaire.
Dans ce cas, la posologie consiste en 3-4 gélules par jour, pendant 7 jours, réparties entre les différents repas. Si, au bout d’une semaine de traitement, la symptomatologie associée à la crise hémorroïdaire ne cède pas, le fabricant (Beaufour Ipsen) conseille de consulter un professionnel de santé. À cet égard, la prise de Ginkor Fort ne doit pas dépasser une semaine.
Effets indésirables

Comme bon nombre de médicaments, Ginkor Fort n’est pas dénué d’effets secondaires. Ils sont, selon le fabricant, très rares. Il en existe cependant : réactions allergiques sévères, angioedème, maux d’estomac, troubles digestifs à type de nausée ou de diarrhée, maux de tête, troubles cutanés (éruption de type eczéma, urticaire, prurit), hypertension artérielle.
Malgré leur caractère de rareté, il est à noter que certains de ces effets secondaires risquent d’aggraver la maladie hémorroïdaire plus que de la résoudre. C’est notamment le cas des troubles cutanés, de la diarrhée et de l’hypertension artérielle, qui risquent de nourrir la symptomatologie (déjà, par elle-même, inconvenante) de la maladie hémorroïdaire. Il convient donc d’arrêter le traitement par Ginkor fort au moindre signe d’alerte.
Avis Ginkor Fort contre les hémorroïdes : qu’en dit la Haute Autorité de Santé ?

Continuons cet avis sur le médicament anti-hémorroïdes Ginkor Fort par son évaluation par la HAS. Cet organisme statue sur l’efficacité présumée des spécialités pharmaceutiques et sur leur éligibilité à être remboursés.
"HAS estime que le service médical rendu du médicament est insuffisant"
La HAS a publié un rapport en 2005 à propos de Ginkor Fort. S’agissant de son efficience sur la maladie hémorroïdaire1 :
- le médicament est un traitement symptomatique, non curatif ;
- l’efficacité réelle est encore mal établie, l’ampleur des effets de Ginkor Fort sur les poussées hémorroïdaires, le risque de prolapsus et l’amoindrissement des douleurs étant difficile à apprécier ;
- la tolérance au médicament apparaît bonne ;
- le rapport efficacité/effets indésirables est mal établi ;
- aucune étude clinique contrôlée n’est disponible à propos de Ginkor Fort, ni aucune étude randomisée comparant Ginkor Fort à un antalgique périphérique dans le traitement des douleurs hémorroïdaires ;
- au final, l’HAS estime que le service médical rendu du médicament est insuffisant.
La conclusion de la HAS est donc simple : Ginkor Fort peut alléger une partie des symptômes de la pathologie hémorroïdaire mais ne peut ni soigner cette maladie, ni se substituer à des mesures hygiéno-diététiques ou à un acte chirurgical. Il n’est en outre pas plus efficace que d’autres traitements d’appoint, comme les AINS ou les antalgiques.
Avis Ginkor Fort contre les hémorroïdes : une composition pertinente en cas de maladie hémorroïdaire ?
Passons à présent à l’examen précis de la composition du médicament antihémorroïdaire Ginkor Fort. Ce dernier permettra en effet de déterminer le mécanisme d’action du traitement et plus précisément encore, son efficacité thérapeutique.
La liste des composants est la suivante :
Le Ginkgo Biloba, également appelé arbre aux quarante écus, est un arbre originaire de Chine. C’est dans ses feuilles que l’on retrouve de nombreuses substances actives, comme des flavonoïdes et des terpènes. Elles sont couramment employées pour leurs propriétés pharmaceutiques. Dans le cas de Ginkor Fort, c’est essentiellement le bilobalide que l’on extrait pour l’adjoindre aux préparations veinotoniques.
Bilobalide

Le bilobalide est l’un des principaux terpénoïdes des feuilles de Ginkgo. Il est plutôt connu pour ses effets neuroprotecteurs, néanmoins il est aussi prisé pour traiter l’insuffisance veineuse chronique. En effet, la science lui reconnaît des propriétés vasodilatatrices, c’est-à-dire qu’il permet une plus grande flexibilité des vaisseaux sanguins en cas de vasoconstriction excessive, de rigidité veineuse ou de paresse circulatoire2.
"Ginkor Fort peut donc agir positivement sur l’inflammation [...] et ainsi, amenuiser les douleurs inflammatoires associées"
En outre, le bilobalide est, à l’instar d’autres flavonoïdes, un antioxydant naturel. Or, les maladies veineuses (comme la pathologie hémorroïdaire) bénéficient de la prise d’antioxydants, qui réduisent l’ampleur des signes cliniques – hypertension veineuse, œdème, douleurs3. Le bilobalide extrait du Ginkgo Biloba et présent dans Ginkor Fort peut donc agir positivement sur l’inflammation typique des crises hémorroïdaires et ainsi, amenuiser les douleurs inflammatoires associées4.
Un bémol toutefois : l’extrait normalisé de la feuille de Ginkgo, riche en bilobalide, augmente les effets des anticoagulants par son action vasodilatatrice. C’est la raison pour laquelle la prise de Ginkor Fort est pondérée par la prise d’anticoagulants5.
Troxérutine

La troxérutine est un composé organique dérivé de la rutine, un flavonoïde présent dans de nombreuses plantes, la plus connue étant le sophora du Japon (Sophora japonica L.)6. Elle est principalement envisagée dans le traitement symptomatique des troubles circulatoires. À ce titre, elle s’avère efficace pour atténuer certains des symptômes de l’insuffisance veineuse, comme les sensations de pesanteur, les crampes, les démangeaisons et les douleurs à la palpation7, avec une diminution notable de la stase veineuse (stagnation du sang dans les veines provoquant la dilatation accrue et l’inflammation localisée)8.
"diminution notable de la stase veineuse (stagnation du sang dans les veines provoquant la dilatation accrue et l’inflammation localisée)"
La pathologie hémorroïdaire étant une forme d’insuffisance veineuse, se manifestant dans la sphère rectale et anale, l’on peut assumer que la prise ponctuelle de troxérutine peut s’avérer bénéfique.
Chlorhydrate d’heptaminol
Autre composant de Ginkor Fort : l’heptaminol, un alcool utilisé dans de nombreuses spécialités pharmaceutiques pour traiter l’hypotension orthostatique. Cette pathologie se manifeste par une baisse excessive de la pression artérielle en position debout – une conséquence d’une régulation anormale de la pression artérielle, elle-même due à une défaillance de la contractilité des vaisseaux et un tonus vasomoteur fluctuant9. Le chlorydrate d’heptaminol vise donc à stabiliser la tension artérielle. Ses effets veinotoniques sont toutefois légers, si bien qu’il est vendu sans ordonnance.
Stéarate de magnésium
Le stéarate de magnésium (également connu sous le numéro E572) est un additif, sans portée thérapeutique notable. Il est en effet utilisé dans les préparations pharmaceutiques pour améliorer la texture des comprimés et gélules (pouvoir antiagglomérant).
En principe, il n’est pas dangereux pour la santé10, cependant il est de qualité très variable : il est désormais d’origine végétale mais peut provenir de végétaux de culture OGM ou d’huiles végétales hydrogénées ou polluées.
Silice colloïdale anhydre
Il s’agit là d’un autre additif, sans portée thérapeutique, principalement utilisé comme adsorbant gastro-intestinal11 : il permet au médicament d’être correctement absorbé par l’organisme lors de son passage dans le système digestif. Par ailleurs, les composés à base de silice agissent comme des agents antiagglomérants et sont, à ce titre, très employés dans l’industrie agro-alimentaire.
Le principal risque des silicates est qu’ils sont susceptibles de contenir des nanoparticules pouvant nuire à la santé intestinale12. Aussi, les médicaments et aliments contenant des dérivés de la silice sont à consommer avec modération.
"susceptibles de contenir des nanoparticules pouvant nuire à la santé intestinale"

Composés de l’enveloppe de la gélule
Enfin, terminons l’examen de la composition de Ginkor Fort par une brève analyse des constituants de l’enveloppe des gélules :
- l’oxyde de fer jaune (E172) est un colorant alimentaire de source minérale, toujours sujet à étude, mais potentiellement nocif13 ;
- l’indigotine ou carmin d’indigo (E132) est aussi un colorant alimentaire, issu de l’industrie pétrochimique, dont l’innocuité n’est pas prouvée mais dont la consommation est plafonnée ;
- le dioxyde de titane (E171), additif donnant aux comprimés un aspect plus blanc, est très problématique, puisque notoirement répertorié comme cancérogène potentiel par le Centre International de Recherche sur le Cancer14 ;
- la gélatine, ingrédient employé en pharmaceutique comme agent d’enrobage, est d’origine animale (donc non vegan) et soumise à cet égard à des contrôles très stricts.
"dioxyde de titane (E171), additif [...] très problématique, puisque notoirement répertorié comme cancérogène potentiel"
Avis Ginkor Fort contre les hémorroïdes : mécanisme d’action et efficacité
Passons à présent à l’analyse globale de Ginkor Fort. Ses différents composants révèlent-ils une efficacité sur la maladie hémorroïdaire ?
L’association du bilobalide, de la troxérutine et de l’heptaminol est bénéfique à la microcirculation : relance veineuse avérée, atténuation notable des symptômes typiques de l’insuffisance veineuse (sensations de pesanteur, douleurs, fourmillements et œdèmes des jambes)15.
Il en est de même sur la maladie hémorroïdaire16 : il semblerait que la prise ponctuelle de Ginkor Fort permette une amélioration des symptômes fonctionnels, comme le prurit anal et le risque de rectorragies. Ceci s’explique tout simplement par les propriétés veinotoniques et/ou anti-inflammatoires inhérentes aux principes actifs du médicament.
"Sur les 6 additifs présents dans le médicament 3 sont potentiellement nocifs pour la santé"
Toutefois, il convient d’émettre un bémol : Ginkor Fort n’est pas dénué de substances dont l’innocuité est remise en question. Sur les 6 additifs présents dans le médicament :
- 3 sont potentiellement nocifs pour la santé ;
- 3 sont issus de sources problématiques (animale, pétrochimie) ;
- 3 sont des colorants purs, adjoints à la préparation à des fins purement esthétiques, donc inutiles d’un point de vue thérapeutique.
Avis Ginkor Fort contre les hémorroïdes : conclusion
Ginkor Fort peut aider à atténuer certains symptômes de la maladie hémorroïdaire comme le prurit anal et le risque de rectorragies. Il ne peut en revanche pas la guérir.
Comparé à d’autres médicaments oraux disponibles sur le marché, Ginkor Fort n’a qu’un effet positif modeste. De plus, il contient un certain nombre d’ingrédients problématiques. C’est pourquoi nous pensons qu’il existe de meilleures alternatives contre les hémorroïdes.
"Ginkor Fort peut aider à atténuer certains symptômes de la maladie hémorroïdaire [...]. Il ne peut en revanche pas la guérir."
Les alternatives à Ginkor Fort
Au regard de ce verdict pour cet avis Ginkor Fort contre les hémorroïdes, il semble bon de rappeler que la maladie hémorroïdaire est une affection systémique, reposant sur une multitude de causes :
- une insuffisance veineuse se localisant dans la sphère anale ;
- l’âge, qui induit un affaiblissement du retour veineux et une perte d’élasticité des veines hémorroïdales (hémorroïdes internes et externes) et des tissus de soutien ;
- l’hérédité ;
- une pression accrue sur les hémorroïdes, due à un problème postural, des troubles du transit intestinal, des activités induisant cette pression ;
- une malnutrition provoquant des diarrhées ou de la constipation.
Ces causes sont nourries par des facteurs favorisants, comme la grossesse, l’obésité et la sédentarité.
"la maladie hémorroïdaire est une affection systémique, reposant sur une multitude de causes"
Aussi, un traitement symptomatique d’appoint peut tout au plus soulager certains des symptômes invalidants des crises hémorroïdaires, sans pour autant soigner le mal à la racine. La prise de Ginkor Fort ne peut se substituer à une révision de son mode de vie général :
- une alimentation variée et équilibrée, riche en fibres et pauvres en aliments transformés ;
- une activité physique régulière, qui permet de relancer la pompe veineuse, y compris dans la zone anale ;
- un évitement des toxiques (alcool, tabac, excitants), du stress et des positions statiques (debout ou assis) ;
- une hydratation suffisante et à base d’eau, pour éviter tout risque de constipation.

Pour lutter contre les hémorroïdes, il s’agit aussi de prendre quelques dispositions lors de ses passages à la selle :
- une défécation accroupie (ou, à défaut, jambes surélevées), rapide (pas de station assise prolongée sur les toilettes) et systématique lorsque le besoin s’en fait ressentir ;
- une toilette de l’anus avec un papier hygiénique doux ou humide, sans frottement excessif ;
- des bains de siège pour apaiser les douleurs, si elles existent.
Enfin, la prise ponctuelle de cures de compléments alimentaires de phytothérapie ou de laxatifs doux peut grandement atténuer la souffrance hémorroïdaire. En effet, certaines plantes sont réputées pour leurs vertus veinotoniques, vasculoprotectrices et hémostatiques. C’est le cas du fragon petit-houx, du mélilot, du cassis, de la vigne rouge, du marron d’Inde ou de l’achillée millefeuille.
D’autres sont des laxatifs de lest très appréciables, permettant d’enrichir le bol alimentaire en fibres douces pour l’intestin : psyllium blond, graines de lin, graines de chia, son de blé ou d’avoine. Des plantes comme le séné, la bourdaine, la mauve ou la réglisse sont elles aussi naturellement laxatives et peuvent faciliter le passage aux toilettes.
Le recours aux compléments alimentaires doit se faire avec toutes les précautions d’usage : s’assurer qu’ils sont 100 % naturels, que leur teneur en actifs naturels est convenable et que leur fabrication et provenance sont contrôlées (privilégier un produit fabriqué en France ou, à défaut, en Union Européenne). Formule H et Venaflux en sont de bons exemples.
Sources
- 2005, HAS, GINKOR FORT ↩︎
- 2005, Nishida, Satoh, Age-related changes in the vasodilating actions of Ginkgo biloba extract and its main constituent, bilobalide, in rat aorta ↩︎
- 2019, Lichota et al., Therapeutic potential of natural compounds in inflammation and chronic venous insufficiency ↩︎
- 2013, Goldie, Dolan, Bilobalide, a unique constituent of Ginkgo biloba, inhibits inflammatory pain in rats ↩︎
- Ginkgo ↩︎
- Rutoside ↩︎
- 2004, Riccioni, Sarcinella, Izzo, Palermo, Liguori, Effectiveness of Troxerutin in association with Pycnogenol in the pharmacological treatment of venous insufficiency ↩︎
- 2016, Le Dévéhat, Vimeux, Bondoux, Hemorheological effects of oral troxerutin treatment versus placebo in venous insufficiency of the lower limbs ↩︎
- MSD, Hypotension orthostatique ↩︎
- 2017, Hobbs et al., Magnesium stearate, a widely-used food additive, exhibits a lack of in vitro and in vivo genotoxic potential ↩︎
- Silice ↩︎
- UFC Que Choisir, Test E551 Dioxyde de silicium (amorphe), Silice (amorphe) ↩︎
- UFC Que Choisir, Test E172 Oxydes de fer, hydroxydes de fer ↩︎
- CIRC, Dioxyde de titane et effets sur la santé ↩︎
- 2005, Pokrovskii et al., The assessment of medical therapy effectiveness of patients with lower limb chronic venous insufficiency: the results of prospective study with Ginkor Fort ↩︎
- 2022, Noikashvili, Gerbutaviciene, Ginkgo biloba, troxerutin and heptaminol chlorhydrate combined treatment for the management of venous insufficiency and hemorrhoidal crises ↩︎